La chronique de Tiru

Ramana Garden est profondément relié à Tiruvannamalai, sa mythique montagne Arunachala et celui qui pour nous en est sa représentation humaine, Ramana Maharshi. Une manière d'entretenir ce lien est de vous proposer chaque mois une chronique racontant des aspects de la vie sur place, à l'ashram, dans les rues de la ville ou quelque part au Tamil Nadu.
LA CHRONIQUE DE TIRU
par notre correspondante sur place Sylvia
Ma plus grande joie le matin est de rejoindre l’ashram de Ramana Maharchi. Mais avant de passer son porche arrondi et de goûter à la sérénité du lieu propice à l’introspection, je dois traverser la grande rue et son incroyable brouhaha de klaxons. En Inde, le klaxon est la forme de langage la plus répandue et la seule que je comprenne vraiment. Tout sur la route claironne et chaque véhicule a sa tonalité propre. Une joyeuse cacophonie, étonnante mais apparemment indispensable. Pour atteindre Ramanashramam je dois fendre le flot ininterrompu de véhicules, réinitialiser mon cerveau pour qu’il n’oublie pas que les Indiens roulent à gauche et surtout réaliser rapidement que ni vélo, ni scooter, ni tuktuk, ni voiture, ni camion, ni bus ne freinera pour moi.
J'ai heureusement plusieurs solutions !


Malheureusement la vache n’est pas toujours au bon endroit au bon moment, donc ma dernière solution c’est le groupe de femmes avec enfants qui comme moi étudient la situation. Je m’incruste mine de rien mais je suis toujours démasquée et j’ai droit à un sourire compatissant et un petit signe de la main m'engageant à suivre le mouvement quand il faut s’élancer de l’autre côté. Vous vous dites que j’aurais pu m’en remettre à la grâce de Ramana et traverser les yeux fermés. J’y ai pensé très brièvement mais bizarrement je n’ai pas tenté l’expérience…
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Je suis donc arrivée indemne tous les jours à l’ashram pour profiter de ce lieu extraordinaire. Passée l’arche, je laisse tout le bruit du monde derrière moi et surtout tout mon bruit intérieur, tout
est parfait et plus rien ne compte que de goûter la joie d’être là. Le cœur battant, je dépose mes tongs au milieu de dizaines d’autres et je traverse la cour sans oublier de saluer l’illupai, l’arbre vénérable vieux de 400 ans qui trône à l’entrée et qui m’émerveille à chaque fois. En montant les quelques marches devant la librairie, j’admire Arunachala qui surplombe l’ashram de son immuable présence, sur ma gauche un paon posé fièrement sur un muret ignore mon regard admiratif, à ma droite je souris à un petit macaque, totalement indifférent à mon ravissement. Je sens le sol chaud sous mes pieds nus, mon regard glisse sur les visages des dévots très nombreux à cette période de l’année et j’arrive enfin devant l’imposant Samadhi de Ramana et sa statue dorée.
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Je pourrai vous décrire ce magnifique sanctuaire, vous parler des imposants piliers en granit, du lingam, des milliers de fleurs, des superbes photos de Ramana sur les murs, des méditants sur le sol en marbre, des pujas quotidiennes, mais cela ne vous dirait rien de ce qui se vit ICI. C’est à l’intérieur que la magie opère. Qui suis-je ?

Être là...
Simplement présente...
Coeur ouvert...
Tranquille...
OM namo bhagavate shri Ramanaya
C'est mon deuxième séjour à Tiruvannamalai et j’en éprouve une joie intense. J'y reviens accompagnée de ma soeur. L’Inde s’accueille tout entière, à bras le corps, sans jugement ni état d’âme. Tout se côtoie sans filtre, la vie, la mort, le pire et le meilleur, toute une frénésie forte et bruyante. J’aime particulièrement arpenter les rues et me laisser happer par l'ambiance étourdissante, pleine de couleurs, de bruit, d’odeurs avec une foule aux mille visages.
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La première est de mettre ma main dans celle de ma sœur. Il y a des dons qui ne s’expliquent pas car ma sœur sait se glisser au bon moment entre deux vélomoteurs, trois voitures et un bus. Elle sait s’arrêter au beau milieu de la route pour éviter la collision avec le tuktuk, marcher ou courir rapidement sur le trottoir d’en face. Ma main dans celle de ma sœur, c’est moi redevenue petite fille en totale confiance, en absolu lâcher prise mais c’est surtout l’assurance d’arriver à bon port.
Si je suis seule, j’ai une autre possibilité, suivre une vache. Pour les vaches, tout le trafic stoppe. D’ailleurs elles le savent. Ces demoiselles à quatre pattes qui errent un peu partout dans la ville ne se posent aucune question avant de traverser. Pourtant je vous assure que même les chiens y regardent à deux fois, une fois à droite, deux fois à gauche. Parfois ils renoncent carrément Pas les vaches ! À Tiru elles sont reines, elles vaquent à leurs occupations placidement, te bousculent à l’occasion pour passer, fouillent tranquillement dans les ordures, siestent où elles veulent et traversent lentement. Suivre une vache est gage de se retrouver indemne de l’autre côté.
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